ImperiumFrancis Parker Yockey |
L'histoire
des nations dans la Culture Occidentale suit un grand développement
triadique. La Thèse fut l'unité occidentale, l'unité
des Croisades et la période de l'Empire et de la Papauté.
Cela continua essentiellement par la préservation de l'unité
vis-à-vis des Barbares, jusqu'au milieu du 18ème siècle.
L'Antithèse fut la période du nationalisme politique, qui
accompagnait le Matérialisme, et qui exerçait une influence
si puissante qu'à cette époque les hommes pensaient que les
nations produisaient la Culture, au lieu du contraire. Finalement l'accent
mis sur le nationalisme devint si grand que certains leaders voulurent
trahir leurs nations en les livrant à l'esclavage de forces extra-européennes
plutôt que rejoindre un organisme occidental unifié. La Synthèse
est la période de l'Avenir. Elle existe partout dans les esprits
de la classe porteuse de Culture de l'Occident, et pendant un instant elle
fut réalisée, dans sa première forme brute et provisoire,
durant la Seconde Guerre Mondiale. Elle revient à la Thèse,
mais conserve les créations de l'Antithèse, car cette grande
Synthèse n'est pas un simple négatif. Aucune «nation»
européenne de l'ancien type ne peut plus, sous cette nouvelle Idée,
être l'objet d'un coup de force quelconque pour changer ou abolir
ses caractéristiques locales. Considérée comme une
réalité spirituelle, la Synthèse ne peut pas être
répandue par la force physique. [Photo: Yockey en état d'arrestation,
juste avant sa mort en juin 1960.]
Ce n'est pas seulement dans la sphère des nations mais dans la totalité des manifestations de la vie de la Civilisation Occidentale que la Synthèse pénètre avec ses nouvelles valeurs, son imagination supérieure, et sa nouvelle puissance créatrice. Pendant la dés-unification de plus en plus radicale de l'Occident, l'antagonisme des diverses Idées les unes contre les autres s'accrut jusqu'à la folie. Le Commerce combattit contre l'Autorité, le Tiers Etat contre la Société, les Protestants contre les Catholiques, le Nord contre le Sud, l'Angleterre contre l'Espagne, la France contre l'Espagne, l'Angleterre contre la Prusse, la Science contre la Religion, le Rationalisme contre l'Ame, la lutte des classes contre l'Autorité et la Propriété. La fièvre nationaliste, la pire de toutes, fut répandue partout par les armées de la France sous le grand Napoléon. La même ferveur nationaliste de ses troupes qui lui donna ses victoires sur 150 champs de batailles se transmit [à tous], car elle était le contenu de l'Esprit de l'Epoque. Cet Esprit contamina tout l'Occident, et inspira la résistance espagnole et le soulèvement prussien qui l'abattirent finalement. Il n'y avait aucune nécessité interne à l'horrible dénouement de l'Age du nationalisme, les guerres d'annihilation. Ce n'est pas le Destin, mais la pathologie de la Culture, qui fit que tout l'Occident s'effondra, et que des étrangers vinrent se faire la guerre sur son sol, et avec son sang. Pourtant cela arriva, et l'horrible résultat de la Seconde Guerre Mondiale impose une nouvelle manière de penser à toute la classe porteuse de Culture de l'Occident. Au contraire, cependant, il y a une nécessité interne à la disparition finale de l'Age du nationalisme et des guerres d'annihilation. La grande Synthèse, l'Imperium, le remplace. La Synthèse contient en elle les composants plus anciens de la Thèse et de l'Antithèse. Les instincts médiévaux primordiaux de la Culture Occidentale sont encore présents dans l'Idée de l'Imperium. Il ne peut pas en être autrement. Egalement présentes sont les diverses Idées que ces instincts, dans le cadre de cette Culture, formèrent pour elle, les religions, les nations, les philosophies, langues, arts et sciences. Mais elles ne sont plus présentes en tant que contrastes, mais en tant que simples différences. Disparue -- disparue à jamais -- est toute notion que l'une de ces Idées -- nationales, linguistiques, religieuses, sociales -- a la mission d'anéantir une autre Idée. Les adhérents de l'Empire sont encore distincts des adhérents de la Papauté -- mais cette distinction ne domine pas leurs esprits, car au-dessus se trouve maintenant l'Idée de l'Imperium, le retour aux origines supra-personnelles, et ces deux puissantes Idées ont la même source spirituelle. La différence entre Protestants et Catholiques -- jadis exaltée jusqu'au casus belli -- a disparu de la même manière. Les deux continuent à exister, mais il est inconcevable que cette différence puisse à nouveau diviser la Civilisation Occidentale en deux camps. Il y a eu aussi les différences de race et de tempérament entre Teutons [ = Germains] et Latins, entre Nord et Sud. Autrefois celles-ci ont pu contribuer à fournir des motifs à l'Histoire -- elles ne peuvent plus le faire. A nouveau, les deux font partie de l'Occident, bien que différentes, et l'Idée de l'Imperium monopolise la motivation de l'Histoire. Les anciennes nations, les religions, les races, les classes -- ce sont maintenant les blocs de construction de la grande structure Impériale qui est en train de se fonder. Les différences locales culturelles, sociales, linguistiques, demeurent -- il n'y a aucune nécessité pour l'Idée de l'Imperium d'annihiler ses Idées composantes, produits collectifs d'un millier d'années d'histoire occidentale. Au contraire, elle les affirme toutes, dans une sens supérieur elle les perpétue toutes, mais elles sont à son service, et ne sont plus au centre de l'Histoire. L'Idée de l'Imperium ne doit pas non plus être confondue avec n'importe quelle doctrine ou n'importe quel système rationaliste stupide, n'importe quel lâche millenium. Ce n'est pas un programme, ce n'est pas une liste de demandes, ni une plaidoirie, ni un bavardage juridique sur le concept de souveraineté. Tout comme l'Avenir a toujours dû combattre les forces de résistance du Passé, ainsi doit faire cette puissante Idée universelle. Sa première phase est la conquête spirituelle des esprits et des âmes de la classe porteuse de Culture de l'Occident. Cela est entièrement inévitable. La phase suivante est la réalisation externe, dans une nouvelle forme étatique et une nouvelle forme nationale, de l'Idée. Dans cette phase il peut y avoir des guerres civiles, peut-être des guerres «internationales» tardives entre anciennes nations occidentales, peut-être des Guerres de Libération contre les forces extérieures. La première phase a déjà commencé, avec un rythme lent et irrésistible. Les autres phases doivent lui succéder, que la dernière perfection de l'Idée soit atteinte ou pas dans la Réalité. Le traité de Fontainebleau, en 1763, conclu avant la naissance de Napoléon, eut des conséquences fatales pour celui-ci, qui les combattit en vain à mesure qu'elles se développaient. L'Occident doit combattre l'héritage de deux Guerres Mondiales, qui ont détrôné l'Europe, et l'ont rendue vassale des barbares et des colonisateurs. Il doit reconquérir la suprématie mondiale que les petits adversaires jaloux du Héros ont jetée au vent. Le seul espoir de succès réside dans l'intensité et la perfection de la réalisation du premier stade, la victoire de l'Idée de l'Imperium dans les esprits d'élite. Aucune force à l'intérieur de la Civilisation ne pourra ensuite résister à la Réunion Culturelle qui unira le Nord et le Sud, les Teutons et les Latins, les Protestants et les Catholiques, la Prusse, l'Angleterre, l'Espagne, l'Italie et la France, pour les tâches qui nous attendent à présent. [...] La situation de l'année 1948 nous permet-elle de rêver à l'accomplissement de ce grand Impératif? Des millions de gens meurent de faim en Europe au moment où j'écris, et personne dans le monde extérieur ne s'en préoccupe. D'autres millions vivent dans des conditions inhumaines dans des geôles, des camps de concentration, ou traités comme une caste d'Intouchables, privés de droits humains. Non seulement l'Occident n'a pas d'Armée, mais ses anciens leaders sont en geôle, pour ceux qui n'ont pas encore été pendus. Le pouvoir en Europe aujourd'hui est détenu par deux sortes d'hommes, les étrangers à la Culture, et les traîtres. Une Civilisation peut-elle mourir ainsi? Deux pouvoirs sans visage pourront-ils étouffer une Culture, affamer et disperser sa population? Cet ouvrage est l'expression de ma croyance qu'ils ne le peuvent pas, que l'impénétrable force du Destin l'emportera sur les forces extérieures ainsi que sur l'obstacle interne du Passé. Au moment précis où leur victoire semble complète et assurée pour toujours, l'Europe commence à s'agiter. Elargie et instruite par la tragédie, la défaite et la catastrophe, l'âme occidentale émerge des ruines, intacte dans sa volonté et plus pure dans son unité spirituelle que jamais auparavant. Le grand rêve et but de Leibnitz, l'union de tous les Etats de l'Europe, est plus proche grâce à la défaite de l'Europe, car dans cette défaite elle perçoit son unité. La mission de cette génération est la plus difficile à laquelle a jamais fait face une génération occidentale. Elle doit briser la terreur qui lui impose le silence, elle doit regarder vers l'avant, elle doit croire quand il n'y a apparemment pas d'espoir, elle doit obéir même si cela signifie la mort, elle doit combattre jusqu'à la fin plutôt que de se soumettre. La fortifier signifie savoir qu'aucune force matérialiste ne peut prévaloir contre l'Esprit de l'Héroïsme. Comme les hommes d'Aragon et de Castille qui combattirent les Maures, comme les Chevaliers Teutoniques et les Prussiens qui combattirent les Slaves, les hommes de cette génération doivent combattre pour l'existence future de l'Occident. En définitive rien ne peut les vaincre sauf la décadence interne. L'Occident peut consacrer au combat une chose que ni le Barbare ni le parasite ne possèdent: la force du plus puissant Destin supra-personnel qui soit jamais apparu sur ce globe terrestre. Cette Idée supra-personnelle a une force si immense qu'aucune accumulation de procès ou de massacres, aucun entassement d'affamés ou de pyramides de crânes, ne peut la toucher. L'Occident a devant lui deux siècles et des dizaines de millions de vies des générations à venir pour la guerre contre le Barbare et le déformeur. Il a une volonté qui n'est pas seulement sortie intacte de la Seconde Guerre Mondiale, mais qui est maintenant mieux exprimée dans toute l'Europe, et qui gagne en force chaque année, chaque décennie. La simple supériorité matérielle ne servira pas à grand chose dans une guerre dont la durée sera mesurée, si nécessaire, en siècles. Napoléon connaissait, et l'Occident connaît encore, la primauté du spirituel dans la guerre. Le sol de l'Europe, rendu sacré par les fleuves de sang qui l'ont spirituellement fertilisé pour un millénaire, sera encore une fois arrosé de sang jusqu'à ce que les barbares et les déformeurs aient été expulsés et que la bannière de l'Occident flotte sur lui de Gibraltar au Cap Nord, et des promontoires rocheux de Galway à l'Oural. Cela est promis, non par la simple résolution humaine, mais par un Destin supérieur, qui se préoccupe peu de savoir si cela arrivera en 1950, 2000 ou 2050. Ce Destin ne se lasse pas, il ne peut pas non plus être brisé, et son manteau de force descend sur ceux qui le servent. Was mich nicht umbricht, macht
mich stärker.
FIN
Ce texte est extrait de la section finale du livre de Francis Parker Yockey, Imperium, pp. 612-619. Première édition en 1948; deuxième édition: Costa Mesa, CA: Noontide Press, 1962. |