AphorismesExtraits des ecrits de Oswald Spengler |
L'homme fait l'histoire ; la femme
est l'histoire. La reproduction des espèces est féminine
: elle court constamment et tranquillement à travers toutes les
espèces, animales ou humaines, à travers toutes les cultures
à vie courte. Elle est primitive, inchangée, éternelle,
maternelle, comme une plante, et sans culture. Si nous regardons en arrière,
nous voyons qu'elle est synonyme de la vie elle-même.
Du peu que nous pouvons connaître des événements du futur, une chose est certaine : les forces du mouvement du futur ne seront rien d'autre que celles du passé : la volonté du plus fort, les instincts vitaux, la race, la volonté de posséder, et le pouvoir. La question de savoir si la paix dans le monde sera possible peut être tranchée seulement par quelqu'un qui est familiarisé avec l'histoire du monde. Etre familiarisé avec l'histoire du monde signifie, cependant, connaître les êtres humains tels qu'ils ont été et tels qu'ils seront toujours. Il y a une immense différence, que la plupart des gens ne comprendront jamais, entre voir l'histoire future comme elle sera et la voir comme on aimerait qu'elle soit. La paix est un souhait, la guerre est un fait, et l'histoire n'a jamais prêté attention aux désirs et aux idéaux humains. Parler de la paix dans le monde s'entend aujourd'hui seulement parmi les peuples blancs, et pas parmi les races de couleur, beaucoup plus nombreuses. C'est un état de fait inquiétant. Quand des penseurs individuels et des idéalistes parlent de paix, comme ils l'ont fait depuis des temps immémoriaux, l'effet est négligeable. Mais quand des peuples entiers deviennent pacifistes, c'est un symptôme de sénilité. Les races fortes et jeunes ne sont pas pacifistes. Adopter une telle position, c'est abandonner le futur, car l'idéal pacifiste est une condition terminale qui est contraire aux faits de base de l'existence. Aussi longtemps que l'homme continuera à évoluer, il y aura des guerres. Le pacifisme signifie laisser les non-pacifistes prendre le contrôle. Le pacifisme restera un idéal, la guerre un fait. Même si le monde était unifié sous une seule autorité, il y aurait toujours des guerres, qu'on nommerait des rébellions : distinction purement verbale. Si les races blanches sont décidées à ne plus jamais faire la guerre, les races de couleur agiront différemment et deviendront les maîtresses du monde. L'abondance des naissances dans les populations primitives est un phénomène naturel, dont l'existence même ne peut être remise en question, quels que soient ses avantages ou ses désavantages. Lorsque les raisons de s'interroger sur l'existence de la vie entrent dans la conscience humaine, la vie elle-même est déjà remise en question. Soudain tous ces individus qui sentaient hier que « nous » signifiait seulement leurs familles, leurs professions, ou peut-être leurs communautés, deviennent membres d'une nation. Leurs émotions et leurs pensées, leurs égos, ce «quelque chose» à l'intérieur d'eux, tout est transformé : ils sont devenus des êtres historiques. C'est notre tâche : donner autant de sens que possible à cette vie qui nous a été accordée, cette réalité avec laquelle le destin nous a entourés ; vivre de telle manière que nous puissions être fiers de nous-mêmes ; agir de telle manière qu'une partie de nous survive. Les animaux et les hommes primitifs ne sont ni pervers ni licencieux. Leur Eros est en harmonie rythmique avec l'univers. Seule la civilisation a fait un problème de l'érotisme, le transformant en avidité insatiable. L'homme ordinaire ne veut rien d'autre de la vie que la santé, la longévité, l'amusement, le confort - le «bonheur». Celui qui ne méprise pas cela doit détourner ses yeux de l'histoire du monde, car elle ne contient rien de tel. Le meilleur que l'histoire a créé est une grande souffrance. Dans l'histoire ce n'est pas l'idéalisme, la bonté ou la moralité qui règnent -- leur royaume n'est pas de ce monde -- mais plutôt la résolution, l'énergie, la présence d'esprit, et l'aptitude pratique. On ne peut pas effacer ce fait avec des lamentations et des jugements moraux. C'est la manière dont l'homme est fait ; c'est la manière dont la vie est faite, c'est la manière dont l'histoire est faite. Tout ce qui est grand périt si ceux qui en héritent sont petits. L'impérialisme est un résultat si nécessaire de chaque civilisation qu'il saisit un peuple au collet et l'oblige au rôle de maître quand il refuse de le jouer. En dernière heure, c'est toujours une poignée de soldats qui a sauvé la civilisation. Chaque culture traverse les phases
évolutives de l'homme individuel; chacune son enfance, sa
jeunesse, sa maturité et sa vieillesse.
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